McGill: son questionnaire sur la douleur

par | Avr 12, 2025 | La douleur chronique, outils

Temps de lecture : 9 minutes

McGill, c’est le nom d’un questionnaire devenu incontournable pour mieux comprendre et évaluer la douleur. Créé dans les années 1970 à l’université McGill de Montréal, cet outil ne se contente pas de demander “combien ça fait mal” : il explore les mots, les émotions et les sensations que les patients utilisent pour parler de leur douleur. Il marque un tournant dans la façon d’écouter et d’accompagner les personnes douloureuses.

Qui était McGill ?

Le nom McGill ne désigne pas une personne, mais fait référence à la célèbre université McGill située à Montréal, au Canada. C’est dans cette institution que le psychologue Ronald Melzack a mené ses travaux pionniers sur la douleur. En collaboration avec le neurophysiologiste Patrick Wall, il a conçu un outil novateur : le questionnaire de McGill, également connu sous le nom de McGill Pain Questionnaire (MPQ).

McGill université

Melzack et Wall sont aussi à l’origine de la célèbre théorie du portillon (gate control theory of pain), publiée en 1965. Cette théorie a profondément transformé la compréhension de la douleur. Elle propose que la moelle épinière joue un rôle actif dans le filtrage et la modulation des signaux douloureux. En d’autres termes, la douleur n’est pas simplement un message envoyé du corps vers le cerveau : elle est interprétée, influencée et parfois bloquée ou amplifiée par différents mécanismes nerveux et psychologiques.

Ce changement de perspective a ouvert la voie à une approche multidimensionnelle de la douleur, prenant en compte non seulement les aspects physiques, mais aussi les facteurs émotionnels, cognitifs et contextuels. C’est dans cette dynamique que le questionnaire de McGill a vu le jour, afin d’aider les patients à mettre des mots sur leur douleur et les professionnels à mieux comprendre ce qu’ils vivent.

Pourquoi un questionnaire sur la douleur ?

La douleur fait partie des expériences humaines les plus universelles… et pourtant, elle reste souvent invisible et difficile à décrire. Pendant longtemps, la seule manière d’évaluer la douleur dans le cadre médical a été de demander au patient : « Sur une échelle de 0 à 10, à combien évalueriez-vous votre douleur ? »

Mais cette approche, aussi répandue soit-elle, réduit une expérience riche et complexe à une simple note. Elle ne permet pas de saisir la nature, la qualité, ni l’impact émotionnel de la douleur. Deux personnes peuvent donner la même note de « 7 » à leur douleur, mais vivre des choses totalement différentes : l’une peut ressentir une brûlure continue dans le dos, l’autre un élancement aigu dans les jambes, accompagnés d’angoisse, de fatigue, ou encore de désespoir.

C’est pour répondre à cette limitation majeure que le psychologue canadien Ronald Melzack, dans les années 1970, a conçu le questionnaire de McGill. Son objectif ? Offrir un outil qui restitue la parole du patient, non pas sous forme de chiffres, mais à travers des mots soigneusement choisis. Ces mots sont regroupés en catégories permettant d’explorer la douleur dans toutes ses dimensions : physique, sensorielle, émotionnelle et évaluative.

Sortir du silence et donner du sens

Mettre des mots sur sa douleur, c’est déjà reprendre un certain pouvoir. Cela permet au patient de ne plus rester seul face à une expérience floue, de se sentir entendu, légitimé, et de mieux communiquer avec les soignants. C’est aussi une manière de rendre la douleur plus tangible, plus explicite, donc plus compréhensible pour les autres.

Pour les professionnels, ce type de questionnaire permet de mieux adapter les traitements et l’accompagnement. En comprenant non seulement le patient a mal, mais aussi comment il en parle, on peut envisager une approche plus globale, qui tient compte non seulement du corps, mais aussi du ressenti, de l’émotion, de l’histoire de la personne.

Une avancée essentielle dans la reconnaissance de la douleur

Le questionnaire de McGill n’est pas seulement un outil pratique. Il a marqué une véritable évolution dans la manière dont on considère la douleur. Il rappelle que la douleur n’est pas un signal isolé, mais une expérience humaine, subjective, contextuelle.

Grâce à cette approche, des millions de patients dans le monde ont pu mieux exprimer leur vécu et bénéficier d’une écoute plus fine. Aujourd’hui encore, ce questionnaire est utilisé, notamment dans les cas de douleurs chroniques, de pathologies complexes ou de douleurs sans explication claire.

Questionnaire de McGill

Que mesure-t-il ?

Le questionnaire de McGill ne se contente pas de mesurer l’intensité de la douleur. Il cherche à en décrypter la qualité, l’impact émotionnel et l’interprétation globale. Il repose sur trois dimensions complémentaires, chacune essentielle pour comprendre ce que vit une personne douloureuse.

🔹 Dimension sensorielle : Comment la douleur est-elle ressentie physiquement ?

Cette partie permet de décrire la nature physique de la douleur à travers une série de mots concrets. Le patient est invité à choisir les termes qui correspondent à ses sensations.

Par exemple :

  • Une douleur peut être ressentie comme une brûlure, un élancement, une pression, une piqûre, un fourmillement, un tiraillement, un coup de couteau, ou encore une décharge électrique.
  • Ces mots permettent au soignant de mieux comprendre le type de mécanisme en jeu (inflammatoire, neuropathique, musculaire…).

👉 Cette dimension est particulièrement utile pour différencier les douleurs et adapter le traitement ou l’accompagnement en fonction de leur origine.

🔹 Dimension affective : Quel est l’impact émotionnel de la douleur ?

Ici, on s’intéresse à l’effet psychologique et émotionnel de la douleur sur la personne. La douleur ne se vit pas seulement dans le corps, elle affecte aussi le moral, l’énergie, la capacité à faire face au quotidien.

Exemples de mots proposés :

  • Angoissante, épuisante, pénible, insupportable, déprimante, terrible, écrasante

👉 Ces mots mettent en lumière la souffrance morale, souvent minimisée ou mal comprise, mais pourtant centrale dans l’expérience douloureuse, surtout quand elle est chronique.

🔹 Dimension évaluative : Comment la personne juge-t-elle globalement sa douleur ?

Cette dernière dimension permet de donner une appréciation générale, souvent liée à l’intensité perçue, mais aussi à l’impact global sur la vie.

Le patient peut choisir parmi des termes comme :

  • Légère, modérée, intense, très forte, atroce, paralysante

👉 Cela aide à situer la douleur dans une échelle subjective, mais enrichie par les autres dimensions, et à mieux comprendre comment la personne vit avec cette douleur au quotidien.


🔍 En résumé : Le questionnaire de McGill donne une voix à la douleur. Il permet de décrire, ressentir et juger cette expérience complexe en s’appuyant sur des mots choisis par le patient lui-même. Ce n’est pas un outil “de plus”, c’est un outil qui écoute différemment.

🧠 Fiche pédagogique

Le questionnaire de McGill : comprendre la douleur autrement

🔹 Qu’est-ce que le questionnaire de McGill ?

Créé dans les années 1970 à l’université McGill (Montréal) par le psychologue Ronald Melzack, ce questionnaire est un outil d’évaluation qualitative de la douleur.
Il permet d’exprimer la douleur avec des mots choisis, et non seulement avec une note chiffrée.


🔍 Pourquoi un questionnaire sur la douleur ?

La douleur est complexe : elle peut être physique, émotionnelle, envahissante, épuisante
Un chiffre ne suffit pas à traduire ce vécu.
Le questionnaire de McGill donne la possibilité de décrire la douleur avec précision, en tenant compte de ce que la personne ressent réellement.


📋 Ce que mesure le questionnaire de McGill

Il explore trois dimensions principales :

1. SensorielleComment la douleur est ressentie physiquement

🔸 Mots utilisés : brûlure, piqûre, élancement, fourmillement, tiraillement, coup de couteau, décharge électrique
✅ Cela aide à identifier le type de douleur (neuropathique, inflammatoire, musculaire…).


2. AffectiveQuel est l’impact émotionnel de la douleur

🔸 Mots utilisés : angoissante, épuisante, insupportable, déprimante, écrasante
✅ Met en lumière la souffrance morale, souvent invisible mais bien présente.


3. ÉvaluativeQuelle est la perception globale de la douleur

🔸 Mots utilisés : légère, modérée, forte, atroce, paralysante
✅ Permet de situer la douleur dans l’ensemble de l’expérience vécue.


🎯 Ce que ce questionnaire apporte

  • ✔ Une meilleure communication entre patient et professionnel
  • ✔ Une description plus riche et nuancée de la douleur
  • ✔ Une base utile pour adapter les traitements
  • ✔ Un outil précieux en recherche clinique

🗣 En résumé

Le questionnaire de McGill permet de mettre des mots sur la douleur. Il valorise l’expérience du patient et contribue à une prise en charge plus humaine et personnalisée.

Ce que ce questionnaire apporte

Le questionnaire de McGill est un outil essentiel pour mieux comprendre et gérer la douleur. Il va au-delà de la simple mesure de l’intensité, en permettant de décrire la douleur sous plusieurs angles. Voici ce qu’il apporte concrètement.

Une meilleure communication entre soignant et patient

L’un des principaux atouts du questionnaire de McGill est qu’il facilite une communication plus précise et approfondie entre le patient et le professionnel de santé. En permettant au patient de choisir des mots qui décrivent plus précisément ce qu’il ressent, il surmonte les limites d’une échelle numérique. Une simple note de douleur ne peut pas rendre compte de la diversité des sensations et des émotions liées à la douleur. Le questionnaire permet de détailler la nature, l’intensité et l’impact émotionnel de la douleur, offrant ainsi au soignant des informations plus complètes et utiles. Cela améliore la compréhension mutuelle et aide à adapter l’approche thérapeutique de manière plus ciblée et personnalisée.

Une vision plus fine de la douleur pour adapter la prise en charge

Le questionnaire de McGill permet d’obtenir une vision beaucoup plus nuancée de la douleur. En tenant compte de ses dimensions sensorielles, affectives et évaluatives, il donne une image plus complète de ce que vit le patient. Par exemple, la douleur peut être ressentie comme une brûlure dans une partie du corps ou comme un mal sourd et constant dans une autre. De plus, le patient peut décrire l’impact émotionnel de cette douleur, ce qui peut être crucial pour identifier des souffrances psychologiques liées à la douleur physique.
Cela permet de mieux adapter les traitements. Par exemple, une douleur décrite comme écrasante et déprimante pourra être mieux prise en charge avec un traitement qui inclut non seulement des antidouleurs, mais aussi une approche visant à soulager l’angoisse et la dépression liées à la douleur.

Une base solide pour la recherche clinique

Le questionnaire de McGill est aussi un outil précieux dans le cadre de la recherche clinique. En offrant une description détaillée de la douleur, il permet de suivre l’évolution de celle-ci dans le temps, d’évaluer l’efficacité de différents traitements et de comparer les réponses des patients à divers types de douleurs.
En utilisant des mots spécifiques pour qualifier la douleur, le questionnaire permet aux chercheurs de mieux comprendre les mécanismes de la douleur et de déterminer quelles interventions sont les plus efficaces pour différents types de douleurs. Ce type de données qualitatives enrichit les résultats d’études et ouvre la voie à des traitements plus ciblés et efficaces dans le futur.

Et aujourd’hui ?

Le questionnaire de McGill, que ce soit dans sa version longue ou abrégée, continue d’être largement utilisé dans les pratiques cliniques et les études de recherche sur la douleur. Bien qu’il ait été créé dans les années 1970, il reste l’un des outils les plus fiables et complets pour évaluer la douleur. Sa capacité à aller au-delà des simples chiffres en offrant une description qualitative en fait un instrument toujours pertinent et d’une grande valeur clinique.

Un outil indispensable pour les soins modernes

Dans le contexte de la gestion de la douleur aujourd’hui, le questionnaire de McGill est plus pertinent que jamais. Les traitements de la douleur, qu’ils soient médicamenteux ou non, nécessitent une approche individualisée qui tient compte des perceptions spécifiques du patient. Utiliser un outil comme celui de McGill permet aux soignants de mieux comprendre la diversité des expériences de la douleur et de rendre la prise en charge plus ciblée.
Il est particulièrement utile dans la gestion de la douleur chronique, où l’intensité peut fluctuer, mais où les caractéristiques qualitatives de la douleur (comme l’émotion associée ou la nature des sensations) sont tout aussi importantes.

Une utilisation dans la recherche clinique

Le questionnaire de McGill joue également un rôle important dans la recherche clinique. En permettant de comparer les réponses des patients aux traitements, il offre des données qualitatives qui complètent les approches plus quantitatives comme l’échelle visuelle analogique (EVA). Ces données sont utilisées pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents de la douleur, mais aussi pour évaluer l’efficacité des interventions. Des études récentes continuent de s’appuyer sur le questionnaire de McGill pour tester de nouvelles stratégies de traitement et pour évaluer des thérapies alternatives, y compris des approches psychothérapeutiques ou comportementales dans le cadre de la gestion de la douleur chronique.

Un outil adapté à divers contextes cliniques

Le questionnaire de McGill, avec sa version longue et abrégée, trouve également sa place dans des contextes variés :

  • Dans les hôpitaux et cliniques pour évaluer la douleur post-opératoire ou liée à des pathologies aiguës.
  • Dans les soins palliatifs pour évaluer la douleur liée à des maladies terminales, où l’aspect émotionnel et qualitatif de la douleur est crucial.
  • Dans les soins primaires, où il permet de mieux comprendre les douleurs persistantes et de proposer des traitements adaptés.
  • Dans les EHPAD, où il est souvent difficile d’évaluer la douleur des personnes âgées, qui peuvent avoir du mal à s’exprimer clairement.

Le questionnaire abrégé : une solution pratique pour les praticiens

La version abrégée du questionnaire de McGill est particulièrement utile dans les situations cliniques rapides, où un outil plus long serait difficile à administrer. Bien que plus succinct, il reste un moyen efficace de capturer les éléments essentiels de la douleur, notamment sa nature sensorielle et affective. Son utilisation permet aux soignants d’obtenir rapidement une vue d’ensemble du vécu du patient et de mieux orienter les traitements.

Références et ressources

Pour en savoir plus sur le questionnaire de McGill et son utilisation dans le suivi de la douleur, voici quelques ressources utiles :

  1. Melzack, R. (1975). The McGill Pain Questionnaire: Major properties and scoring methods. Pain, 1(3), 277-299.
    Lien vers l’article de la publication originale
  2. McGill Pain Questionnaire – Short Form (SF-MPQ)
  3. Davis, M. & Webb, S. (2013). The McGill Pain Questionnaire and its impact on clinical care. Journal of Pain Research, 6, 213-220.
  4. The McGill Pain Index : Outil d’évaluation de la douleur dans les soins de santé.
    Lien vers l’article complet

Conclusion

Aujourd’hui, le questionnaire de McGill reste un outil incontournable dans l’évaluation de la douleur, que ce soit pour la gestion clinique ou pour la recherche. En permettant de mieux comprendre la douleur dans ses multiples dimensions, il aide à fournir des soins plus adaptés et personnalisés. C’est un outil qui, au-delà des chiffres, écoute la douleur et en fait une expérience plus humaine et mieux comprise.

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Ecrit par Corine Cliquet

Qui suis-je ? Je suis Corine Cliquet, ancienne infirmière et aujourd'hui coach en gestion de la douleur et conseillère en santé globale. Forte de plus de 20 ans d'expérience dans le domaine de la santé, j'ai choisi d'adopter une approche holistique et humaine pour accompagner les personnes souffrant de douleurs chroniques et de stress. En tant que patiente ressource pour le Syndrome Douloureux Régional Complexe (SDRC) et diplômée d'un Diplôme Universitaire en Éducation Thérapeutique du Patient (ETP), j'accompagne les patients dans la compréhension et la gestion de leur douleur en leur proposant des solutions concrètes, adaptées à leur quotidien. Mon travail repose sur des outils comme l'hypnose, la visualisation et des techniques de gestion du stress, afin d’aider chacun à prendre le contrôle de ses douleurs et de retrouver une meilleure qualité de vie. Ce que je propose : 🌟 Ateliers pratiques : Des sessions collectives pour comprendre la douleur et apprendre à la gérer grâce à des outils simples et efficaces. 🌟 Accompagnement personnalisé : Un suivi individuel pour adapter les stratégies à vos besoins spécifiques. 🌟 Programmes de gestion de la douleur : Des parcours sur mesure pour intégrer des techniques comme l’hypnose et d'autres pratiques centrées sur le bien-être. Mon objectif ? Vous aider à reprendre le pouvoir sur votre douleur et votre santé grâce à des outils concrets et une approche positive, bienveillante et ludique.

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